Journey into reality 7

(Mercredi 7 mars 2001)

Bob Bernstein : Bonjour à tous pour votre rendez-vous mensuel avec Journey into Reality et votre serviteur Bob. Il faut bien reconnaître que ce mois de mars n'a pas battu de records de nouveautés sur le Nexus. J'attire cependant votre attention sur la Nexion Saga où les aventures de Shas et Slug commencent à prendre de l'ampleur. De plus un point sur les épisodes précédents a été réalisé par mon ami Kurt pour aider les futurs auteurs à s'y retrouver. Alors n'hésitez plus à devenir l'un des créateurs de ce Nexworld. Je vous l'avais annoncé pour février et je reprend le risque de le faire à nouveau pour mars, le scénario "Implication personnelle" devrait bientôt être disponible pour Berlin XVIII. Eh oui, les retards et les jeux de rôle ont toujours fait bon ménage ! Le mois dernier, nous avions la dent dure sur un film et bien ce mois, nous allons tirer un coup de chapeau à un autre, je veux parler de Le pacte des loups. Vous faîtes probablement partis des heureux spectateurs qui ont pu apprécier ce spectacle et je ne vais pas vous dire pourquoi cela valait la peine d'aller le voir. Attention si vous n'avez pas vu le film, certains passages des dialogues qui suivent peuvent être considérés commes des spoilers ! Je reçois ce soir, Jean Chastel, l'homme qui a tué la Bête et qui va nous dire pourquoi ce film n'est pas si loin de la réalité. Jean, bonsoir, vous permettez que je vous appelle Jean ?

Jean Chastel : Oh ben oui, m'sieur Bob.

BB : On nous raconte que la Bête ne tuait que des femmes et des enfants. Comment expliquer ce mystère ?

JC : Oh, c'est pas un grand mystère. La Bête, elle tuait surtout dans la montagne. Et là-bas, c'était les femmes et les enfants qui gardaient les troupeaux alors bien sûr...

BB : On nous dit aussi que le Roi de France était agacé par cette histoire. Est-ce vrai ?

JC : Pour sûr ! L'histoire est même allée jusqu'en en Angleterre où on racontait qu'en Gévaudan une Bête mettait en déroute toutes les armées du royaume de France. Sans ça, vous pensez bien qu'il aurait pas envoyé grand monde.

BB :On voit le Capitaine Duhamel organiser des battues mais sans grande réussite. Comment la Bête a-t-elle pu passer au travers.

Transnex

 

Nexion 1

 

Nexion 2

 

Nexion 3

 

Nexion 4

 

JC : On voit qu'vous connaissez pas le Gévaudan ! En plus Duhamel et ses 56 dragons c'étaient plus des soldats que de vrais chasseurs. Et puis, j'vais vous dire, l'évêque, Monseigneur de Choiseul Beaupré, il avait écrit un mandement. Dedans, y disait que la Bête, elle était envoyée par le Diable, qu'elle pouvait apparaître et disparaître comme par miracle. Alors même dans les battues, quand on passait vers un endroit suspect, on allait pas trop y jeter un oeil. Vous y seriez allé vous ?

BB : Peut-être pas... Mais comment étiez-vous informé de ce qui ce passait car CNN n'existait pas à l'époque ?

JC : On discutait, on allait à la messe et puis quand y'avait marché, y'avait aussi les complaintes. Tenez, d'ailleurs je m'en souviens d'une qui vous donnera une petite idée de l'ambiance :

" Venez les yeux en pleurs, Ecoutez je vous prie, Le récit des horreurs D'une bête en furie Si redoutable Qu'on a rien vu de pareil, On ne peut voir la semblable Sous l'éclat du soleil. Lorsqu'elle tient sa proie, Cette cruelle bête En dévore le foie Le coeur avec la tête : Monstre funeste, Cet animal dévorant, A craindre comme la peste Ne s'abreuve que du sang. Ce monstre si affreux Est si épouvantable Qu'on croit voir à ses yeux La figure effroyable, Chacun se cache Afin de se garantir Sans que personne ne sache Comment la faire périr. "

BB : Je vous accorde que cela ne devait guère être rassurant et qu'il devait vous falloir bien du courage pour continuer à aller dans la montagne. Vous avez du être soulagé quand le Roi vous a envoyé son porte-arquebuse Antoine de Beauterne pour succéder à Duhamel.

JC : C'est pas le Chevalier qui est venu en premier. D'abord, ils ont fait appel à un spécialiste de la chasse au loup, un Normand. D'enneval qui s'appelait. Il est arrivé avec sa meute de chiens, bien persuadé que la Bête allait pas faire long feu. Mais comme, j'vous l'ai déjà dit, l'Gévaudan c'est bien particulier comme relief, rien à voir avec le plat de la Normandie. Alors quand ils ont lâché les chiens dans les bois et les fourrés, les bons hommes, ils ont pas pu suivre derrière et le D'enneval il s'est retrouvé Gros Jean comme devant. Il a repris ce qui restait de sa meute et on en a plus jamais entendu parler.

BB : Nous sommes alors le 22 juin 1765 et le lieutenant des chasses du Roi, Antoine de Beauterne arrive pour sauver le Gévaudan. Il ne perd pas son temps puisque trois mois plus tard seulement, le 21 septembre 1765, il abat la Bête. Cela se passe dans les bois du couvent de l'abbaye de Chases et il s'agit d'un loup de 65 kg !

JC : Ouais... enfin... on n'a jamais été sûr que c'était bien la Bête. Il a eu un sacré coup de bol le chevalier de trouver ce gros loup dans ce coin bien tranquille où on n'avait jamais vu la Bête. Mais bon, c'est ça les héros ! En plus ça lui permettait de rentrer à Versailles où il se sentait sûrement mieux que chez nous, pensez, un seigneur comme ça. Pis surtout y paraît que le Roi était content, alors... C'est vrai que pendant trois mois après son départ, 99 jours pour être précis, la Bête elle nous a laissés tranquilles. Seulement voilà, tout à recommencé et cette fois, il était plus question que le Roi se ridiculise en envoyant une nouvelle troupe.

BB : Heureusement, Grégoire de Fronsac est revenu pour tuer la Bête !

JC : Ah non, ça c'est pour le film. Grégoire de Fronsac et son copain indien, c'est Monsieur Gans qui les a inventés, rien à voir avec la vraie histoire.

BB : Alors Jean-François de Morangias non plus n'a pas existé.

JC : Pour celui là, c'est pas tout à fait pareil. Là Monsieur Gans, il s'est inspiré des histoires qu'on a raconté sur mon fils, Antoine Chastel. Comme quoi, il serait parti à l'aventure dans le sud, qu'il aurait été fait prisonnier, qu'il serait devenu eunuque dans un harem avant de devenir gardien de ménagerie de je ne sais quel sultan avant de revenir au pays. Mais il serait pas revenu seul, il aurait ramené avec lui une bête sauvage qu'il aurait dressée. Et comme les gens du coin l'aimait pas bien parce qu'il était pas un bon catholique, il aurait lâché la Bête pour se venger mais moi j'vous dis qu'il a pas fait ça mon Antoine, c'est un bon p'tit gars... enfin... je crois...

BB : Donc l'hypothèse de la Bête dressée et harnachée ainsi que la thèse du complot religieux retenus par le film sont tout à fait plausibles !

JC : J'ai pas dit ça. Sûr que des soldats ont dit qu'ils avaient touché la Bête et qu'après avoir roulé au sol, elle s'était relevée pour reprendre sa course et qu'une cuirasse pourrait expliquer ça mais on en sait rien. Quand à l'église, c'est évident qu'elle a eu un rôle important dans l'affaire mais de là à imaginer que des représentants de Dieu puissent faire une chose pareille, j'y crois pas, c'est pas possible... hein ? C'est pas possible...

BB : Vous devez avoir raison. Alors passons maintenant au 19 juin 1767, date à laquelle vous, Jean Chastel, vous avez tué la Bête du Gévaudan ! Racontez-nous !

JC : En fait c'était une journée de chasse comme les autres. J'avais chargé mon fusil avec des balles en argent faites avec des médailles de la Sainte Vierge que j'avais faites bénir et fondre. J'étais seul, je m'étais assis sur une souche, j'avais posé mon fusil à mon côté et je lisais les paroles de notre Seigneur Dieu. Alors que j'étais en prière, j'ai vu la Bête sortir d'un fourré et s'assoir à une vingtaine de mètres de moi. Elle me regardait semblant attendre quelque chose, comme si elle avait décidé que son heure était venue. J'ai posé mon livre de prières, retiré mes lunettes de mon nez pour les mettre dans ma poche, pris mon fusil, visé et... tiré ! La Bête, touchée, est tombée d'un coup, comme une masse.

BB : Alors vous qui l'avez vue, dîtes-nous, était-ce un loup ?

JC : Non mon jeune ami, je ne sais pas ce que c'était mais je peux vous dire que ce n'était pas un loup. Cette Bête était beaucoup plus grosse, plus féroce, je n'avais jamais vu un animal comme celui-là.

BB :: Qu'avez-vous fait de la dépouille ?

JC : Le Roi avait laissé une récompense pour qui lui ramènerait la Bête alors j'ai décidé de l'emmener à Versailles parce que vous savez, on n'a jamais été bien riche chez les Chastel. Alors en chemin, je me suis arrêté dans les villages pour permettre aux gens de voir la Bête en échange de quelques piècettes. Et au début du mois d'août 1767, je suis arrivé à Versailles.

BB : En aout ! Vous voulez dire que vous avez trimballé le cadavre de cette Bête pendant presque deux mois en plein été dans votre chariot !

JC : Ben oui... c'est pour ça que quand je l'ai présentée au Roi, la Bête, elle sentait pas très bon. Le Roi, lui, il a même pas voulu la voir, il a dit qu'elle puait trop et a ordonné qu'elle soit enterrée dans les jardins de Versailles où elle doit être encore aujourd'hui.

BB : Merci pour cette fabuleuse histoire pleine de mystères, Jean. Je vous rend à votre époque. Au revoir !

JC : Au revoir M'sieur Bob !

BB : Mes amis, je ne sais si la mort de la Bête s'est déroulée telle que Jean nous l'a contée mais ce qui est sûr c'est qu'il a bien tué quelque chose en juin 1767 et que depuis la Bête n'a plus fait de victime. Il y a deux siècles dans le Gévaudan, une Bête a tué près de cent personnes et à l'aube du troisième millénaire, on ne sait toujours pas ce qui s'est réellement passé. Si un jour vous passez par le village de Saugues (43), arrêtez-vous au musée de la Bête. Et puis si vous avez beaucoup de chance, peut-être rencontrerez-vous Jean Richard (non pas celui du cirque, un autre). C'est à ce Monsieur qui a passé des années à enquêter sur la Bête que je dois ce que j'en sais et c'est à lui que je dédie cette page, avec toute mon amitié. Bye !

Toutes les photos présentées ici sont extraites du film de Christophe Gans : Le pacte des loups